Après l'épisode burlesque du rejet de la loi par l'Assemblée nationale, jeudi 9 avril, pour absence de députés favorables à la loi dans l'hémicycle au moment du vote - une première historique dans la vie parlementaire ! - les adversaires de la loi HADOPI ont gagné quelque répit pour remonter au créneau.
Curieusement - ou intentionnellement ? - les médias se sont répandus à l'envi sur le caractère moralisateur de la loi : le vilain internaute pirate sera sanctionné : avertissement puis coupure de sa connexion internet. Tout le débat semblait alors se porter sur le fait que, même avec son abonnement suspendu, l'internaute devrait continuer à payer celui-ci. Et le monde médiatico-politique de s'agiter autour du spectre de la double peine...
Tout ceci est sans doute très intéressant, mais le vrai problème n'est pas là.
La vraie honte de cette loi est que pour parvenir à traquer les pirates sur Internet, une autorité, si indépendante soit-elle, l'HADOPI, sera conduite surveiller en permanence les connexions de tous les internautes de France. Et ceci, nos médias ont "oublié" de l'expliquer aux citoyens.
Nous ne pouvons donc que joindre notre voix aux nombreux opposants et aux quelques autorités qui ont eu le courage de dénoncer cette atteinte aux libertés et à la vie privée du citoyen, tel qu'Alex Türk, président de la CNIL, qui déplorait voici peu la société de surveillance dans laquelle il voyait entrer notre monde, au nom de bons sentiments, ici anti-terroristes, là protecteurs du sacro-saint droit d'auteur.
Oublié (et effacé par le Conseil européen) l'amendement 138 du Parlement européen, affirmant le principe selon lequel aucune mesure de protection de droit de propriété intellectuelle ne pouvait avoir pour effet de restreindre les libertés du citoyen. Oubliées les fortes réserves émises par la CNIL à propos de ce texte. Oubliées les alarmes du CEPD (notre actualité d'hier sur cette institution)... Tous les moyens semblent bons pour protéger les intérêts économiques des major companies. On a connu la France plus attachée aux droits de l'homme et aux libertés publiques...
Rappelons que, suite au gag parlementaire mentionné plus haut, le texte sera de nouveau présenté au vote de l'Assemblée nationale le 28 avril. Entre temps, le Parlement européen pourrait bien encore faire de la peine au gouvernement français...
Il restera aussi le contrôle du Conseil constitutionnel puisqu'il n'est pas douteux qu'il se trouvera 60 députés pour le saisir celui-ci de l'inconstitutionnalité du texte.
Sur ce sujet lire sur notre site :
Flux sur la loi HADOPI (flux d'actualité mis à jour régulièrement) actualité initiale du 3 novembre 2008
Droit : la riposte graduée pour les nuls - 20 novembre 2008
Main basse sur les droits d'auteur - 21 janvier 2009
Citoyens sous surveillance : la loi HADOPI enflamme le monde internet - 13 mars 2009