Le fait est que, depuis quelques décennies, les citoyens des pays riches ne cessent de découvrir de nouvelles voies d'utilisation de la propriété intellectuelle.
Créés, rappelons-le, initialement au 18ème siècle, les dispositifs de protection de l'auteur - système dit de Copyright à partir de 1709 au Royaume-Uni ; système de Droit d'auteur en France sous Louis XVI puis sous forme de loi à partir de 1791 - visaient à protéger le génial créateur d'œuvre de fiction ou d'art plastique ou musicale. Au fil des temps, les législations ont poussé dans la définition de l'œuvre protégée à un tel degré d'abstraction que désormais un simple coup de crayon sur un papier, une simple phrase prononcée dans un lieu public, est protégée et donc susceptible d'être revendiquée.
De sorte que nombreux - pour ne pas dire infinis - sont les cause potentielles de contentieux capables pourrir la vie des honnêtes professionnels qui n'ont que le grand tort de n'être pas hyper-conscients de leurs responsabilités juridiques, c'est-à-dire quasiment juristes à temps plein...
Quelques exemples rapides : une radio libre diffuse de la musique classique, avec la conscience sereine de diffuser au moins des compositeurs tombés dans le domaine public. Mais voilà, le présentateur s'embrouille, annonce l'oeuvre et diffuse celle d'un autre : il y a délit de contrefaçon puisque le droit moral du compositeur (droit perpétuel, celui-là) est bafoué : on a annoncé l'oeuvre d'un autre et diffusé la sienne. Autre cas : négligeant, le même présentateur oublie de citer un des interprètes entendus : il y a délit de contrefaçon de nouveau, cette fois à l'encontre du droit voisin des artistes-interprètes qui, eux aussi, disposent d'un droit à la paternité, sur leur interprétation...
On le voit, les possibilités d'attaquer un diffuseur sur le terrain du droit d'auteur sont infinies.
Toujours sur le terrain de la propriété intellectuelle, les cultures ancestrales se voient aujourd'hui menacées de pillage. Ces cultures et leur patrimoine immémoriel font aujourd'hui l'objet d'appropriations abusives par des occidentaux sans scrupules.
Il en est ainsi des postures du Yoga, pour certaines vieilles de plus de 5000 ans. Comme le Yoga est devenu un vaste enjeu économique, notamment aux États-Unis, très nombreux sont les professeurs et autres gourous qui ont déposé leur méthodes et postures de yoga, héritées de l'Inde antique, sous forme de brevets, de copyright ou de marques, de sorte que toute personne qui utiliserait les mêmes postures seraient obligée de leur verser des redevances...
Le marché du bonheur par le yoga représenterait un chiffre d'affaires évalué à 225 milliards de dollars en Occident (source : The Times of India).
Pour tenter de contrer cette appropriation abusive de savoirs ancestraux, un collectif s'est constitué aux USA : l'Open source yoga unity, tentant de faire admettre que tout ce savoir est nécessairement en open source. Ce groupement a malheureusement perdu, le 1er avril 2005, un procès contre le déposant d'une méthode de Yoga.
Alerté par ce pillage en règle d'un des fleurons de sa culture traditionnelle, le Gouvernement indien a pris l'initiative de référencer et d'authentifier les postures du yoga décrites dans les textes sacrés anciens et de les consigner dans une base de données nommée Traditional knowledge digital library (Bibliothéque numérique des savoirs traditonnels), réalisée avec le concours de plusieurs centaines de chercheurs indiens. Tous ces savoirs ainsi consignés sont donc réputés être dans le domaine public puisque créés depuis des milliers d'années.
Cette base de données ote ainsi toute prétention à l'originalité (critère de protection pour le droit d'auteur) ou à la nouveauté (critère de protection pour les brevets et les marques) d'éventuels déposants indélicats. Elle pourrait donc permettre à tout opposant d'obtenir gain de cause contre le dépôt d'un de ces éléments dans de nombreux pays (en fait, tous les pays ayant signé des conventions internationales sur la propriété intellectuelle : à ce jour par exemple, 167 pays sur 192 présents à l'ONU sont signataires de la Convention de Berne sur le droit d'auteur).
Le collectif Open source yoga unity : www.yogaunity.org
Voir un article sur le jugement du 1er avril 2005 sur The patry copyright blog : http://williampatry.blogspot.com/2005/08/yoga-and-copyright.html
The Traditional knowledge digital library : www.tkdl.res.in
L'article sur The Times of India : Yoga piracy: India shows who's the guru, 22 février 2009 : http://timesofindia.indiatimes.com/India/Yoga-piracy...
Voir l'article sur le Piratage du yoga sur Wikipedia en anglais : http://en.wikipedia.org/wiki/Yoga_piracy
Voir la synthèse de cette affaire : Inde : Halte au piratage du yoga sur le site de traduction de l'actualité mondiale Global Voice en français (23 mars 2009) : http://fr.globalvoicesonline.org/2009/03/23/4783/
Voir une autre synthèse sur Numérama : Référencer les positions du yoga pour empêcher leur piratage, Guillaume Campeau, 19 août 2009) : www.numerama.com/magazine/13674-Referencer-les...